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Bécédémo
J’espère que Francine me pardonnera la légère modification que j’ai apporté à ce mot cueilli dans l’arbre à mots, mais j’ai une petite raison pour ça, comme vous allez pouvoir le constater ci-après.
« Bécédébo, bécédébo » braille le très respectable archéologue.
« Bécédébo, bécédébo, bous boyez bien, cédébo ! » continue-t-il à clamer aux quatre vents.
Ses étudiants sont sidérés. Mais quelle mouche particulièrement vicieuse a bien pu piquer le professeur Maximilien Hélianthus ? Lui si pondéré habituellement, ils ne le reconnaissent pas dans ce dingue écumant.
Il faut avouer que depuis qu’ils sont à la recherche d’une civilisation perdue en pleine jungle équatoriale, la pluie, la chaleur, les insectes ne leur laissent guère de répit. Il faut vraiment être passionné pour subir ce complet décalage avec la vie européenne.
Hier, le professeur Hélianthus a eu le tort de se balader sans son couvre-chef, ce doit être pour ça qu’il est comme fou ce matin, il a sûrement une insolation, doublée d’un rhume carabiné à entendre son élocution fort bizarre.
Depuis ce matin, il est planté devant ce qui semble être le reste d’un mur herculéen couvert d’une végétation curieusement clairsemée par rapport à la marée verte qui les entoure.
Ses élèves sont bien conscients qu’il s’agit là d’une découverte majeure, mais est-ce une raison pour hululer depuis des heures : « Bécédébo, bécédébo » ?
Le distingué professeur Hélianthus lance des regards furieux à ses stagiaires hébétés par ce déferlement de charabia.
« Mais ce n’est pas possible » pense-t-il « qui m’a fichu des empotés pareils, je parle français pourtant. Je m’en vais te renvoyer tous ces imbéciles dans leurs foyers dès que nous serons rentrés » et derechef le voilà qui recommence « Bécédébo, bécédébo ». Comme vous pouvez le constater lorsqu’il pense ce très cher Maximilien Hélianthus n’a plus le nez bouché, ce qui est très logique, même s’il s’agit d’un rhume de cerveau, un cerveau ne peut pas parler du nez, mais trêve d’aparté stupide, reprenons le cours de notre histoire qui, je le crains bien, vous échappe tout autant qu’à nos pauvres étudiants, mais ne vous en faites pas, je ne vous laisserai pas le bec dans l’eau.
Bref, après avoir écouté leur éminent mentor délirer tant et plus et l’avoir regardé sauter dans tous les coins comme un marsupilami en pleine crise de délirium tremens, le médecin de l’équipe s’approche à pas de loup du grand chef et hop une piqûre de calmant.
« Béééécééédééé » Plouf, les étudiants ont juste le temps de récupérer au vol le grand homme qui tombe dans les pommes (ou autre fruit à votre convenance, et d’ailleurs pourquoi ne pourrait-on pas tomber dans autre chose que des pommes ?).
Complètement paniquée, la petite troupe décide de lever le camp sans tarder, manifestement, il plane sur le camp une malédiction à côté de laquelle celle des pharaons est du pipi de chat, parce que quand même pour rendre complètement frapadingue le très sérieux archéologue mondialement respecté Maximilien Hélianthus, il faut vraiment que l’air ambiant soit drôlement chargé en ondes négatives.
Le pauvre professeur reste plusieurs jours plongé dans un profond sommeil, le temps que l’expédition arrive dans une contrée un peu plus civilisée qui lui permettra d’être rapatriée dare-dare.
Au moment d’être embarqué dans l’avion du salut, Maximilien ouvre un œil et murmure « Mais c’est des mots ! », certes, il aurait été plus français de dire "Mais ce sont des mots" mais que voulez vous dans l'excitation du moment, ce léger écart de langage peut être pardonné !
Oups, le grand homme avait repéré sous la végétation du mur des symboles qui ne pouvaient être que l’écriture d’une civilisation perdue.
Re-oups, personne n’a pensé à relever les coordonnées exactes de la cité perdue.
Nul doute que lorsque Maximilien Hélianthus va reprendre complètement ses esprits, il sera tellement furieux qu’il faudra définitivement l’enfermer à triple tour dans les sous-sols du muséum le temps qu’il se calme, ce qui risque de prendre beaucoup de temps. D’ici là, étudiants et médecin se seront sûrement exilés au fin fond du Pôle Nord.
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Commentaires
des conséquences irréparables d'une sinusite sur la carrière d'Indiana Jones !!! un conte bien savoureux !
le mystère règne encore sur cette civilisation perdue mais qui connaissait l'écriture. ça donne des envies de voyage et de découverte. j'aime bien ces histoires d'archélogie.
bonne soirée
Tu as une façon bien à toi d'écrire le français ! Pour Kohlanta je ne peux pas dire, je n'ai jamais regardé
Aaaah Genial !
je me régale en lisant les aventures de ce professeur exalté par sa découverte, tellement qu'il en perd un peu son français classique !
Je me demande d'ailleurs si pour ses étudiants peu attentifs, ou trop peureux, le pôle nord va être assez loin pour échapper à la rogne légitime.Merci Martine pour ce moment de franche gaité !
merci aussi pour tes visites et tes messages, à moi et au dragon. J'ai du mal à bien rendre les visites, comme tu sais, ce qui me désole ou m'énerve suivant les jours, mais ...
Gros bisous à toi
J'ai choisi le Pôle Nord, mais je pense que ce n'est sûrement pas assez loin ! Ne sois ni désolée, ni énervée, tout vient en temps !
Merci à toi, au début j'avais un peu de mal avec ce sacré mot, heureusement que mon professeur est arrivé !
Très bien trouvé, moi ces dernières semaines pas trop d'imagination, ma bronchite à stopper mes idées, merci bonne soirée
Pauvre Professeur ! S'il a besoin qu'on lui répare la tête après cette mésaventure. c'est avec plaisir qu'on l'accueillera à l'atelier.
Je pense qu'un petit passage dans votre atelier lui permettrait effectivement de se calmer un peu
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voilà, plus de chef, plus de groupe ... une balade qui rend malade ! ;-)