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Vieillesse
Pour le thème de la semaine sur la vieillesse, voici une photo de famille qui date de janvier 1967. Je vous présente de gauche à droite : Mon arrière-grand mère Céline (84 ans) , sa "jeune" soeur Gabrielle (74 ans), moi (10 ans), la soeur jumelle de Céline, Zélie (84 ans aussi donc) et debout ma grand-mère (61 ans).
Moins de 10 ans plus tard je perdais ce super petit bout d'arrière grand mère et voilà un extrait du journal que je tenais à l'époque et qui parle de ce deuil, je n'ai rien modifié, juste fait quelques coupures pour que ça ne soit pas trop long. C'est incroyable le nombre de sensations que l'on peut oublier avec le temps.
14 juillet 1976
Aujourd'hui, fête nationale, cela aurait également dû être l'anniversaire de Mémère. Quel âge aurait-elle eu, je ne sais plus 94 - 95 ans ? Je ne sais plus au juste. Aurait eu, oui aurait eu, parce que Mémère est morte, c'est presque faux de dire ça, pas faux, mais étrange plutôt.
Elle était née le jour d'une fête nationale, elle est morte avec une autre fête : Noël. Je sais que j'aurais pû en parler plus tôt, je ne sais pas pourquoi je ne l'ai pas fait. Nous sommes près de 6 mois après, mais je me souviens très bien.
Mémé était arrivée quelques jours plus tôt et nous avait dit qu'il était fort improbable que nous revoyions Mémère vivante. Le 24 au matin, Claude nous téléphonait pour nous dire qu'elle était morte et que l'enterrement aurait lieu samedi.
Lorsque nous avons entendu la sonnerie, nous avons compris ou tout au moins pressenti. Mémé s'est mise à pleurer, Maman n'a rien dit. Moi, je me suis assise dans rien dire, sans savoir quoi faire, je n'ai même pas pleuré, et je n'ai pas ressenti de la peine à proprement parler. C'était un fait, et je m'étonne encore de ne pas avoir été plus profondemment touchée.
Il ne faut cependant pas me taxer d'insensibilité, me traiter de fille sans coeur, ce serait faux, j'aimais Mémère, mais je crois que nous vivons tous avec l'idée de la mort, elle fait si l'on peut dire partie de la vie et plus ceux que nous cotoyons sont âgés, plus la mort devient une éventualité proche, irréversible.
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Pour quelqu'un d'âgé, la mort est toujours proche, on la sent, on l'accepte. Je crois qu'à ce moment je ne pouvais plus penser, des pensées floues sans suite s'enchevêtraient, peut-être est-ce une peine qui s'exprimait plus ainsi que par des larmes.
Le samedi fut un jour étrange, irréel. Le matin nous sommes arrivés chez Mèmère. Mémé repartie le 24 nous attendait, pauvre Mémé, elle l'aimait tant.
Le cercueil était dans cette petite chambre, toute petite chambre qui sent tellement drôle, avec ce gros édredon sur lequel j'adore sauter. Un cercueil clair, je n'arrive pas à m'imaginer Mémère là-dedans.
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Il a fallu pour terminer l'office défiler devant le cercueil, je ne puis dire Mémère, et le bénir avec le goupillon, là je dois dire que ça a été le plus dur, ce goupillon m'a semblé lourd, si terriblement lourd, j'ai senti ma tête tourner, je crois bien que j'ai failli m'évanouir. Ensuite la famille s'est réunie pour recevoir les condoléances, j'ai horreur, mais horreur de ces démonstrations. J'avais envie de pleurer, de dire à tous ces inconnus de partir, de nous laisser, ce sont eux qui rendent tout plus pénible et d'ailleurs combien y en a-t-il de sincères, ils rentreront chez eux et oublieront. Je détester serrer ces mains.
Ensuite, nous sommes montés à pied au cimetière, il faut avouer que les gens dans la rue ont encore le respect des morts presque tous ont salué, on ne peut pas dire qu'ils soient réconfortants, mais je les préfère aux autres
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Et puis, la vie a repris son cours normal, sans plus de difficuté et c'est vraiment déconcertant.
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Commentaires
ce sont des moments difficilles surtout à l'âge que tu avais, la 1ère confrontation avec la mort...mais les anciens mourraient chez eux le plus souvent et le vide était d'autant plus pesant...mais on accompagnait le passage à la mort avec plus d'humanité qu'à l'hopital aujourd'hui .....
bises et merci
Ce qui nous anime au décès d'une personne jeune, c'est un sentiment de révolte devant une vie inachevée.
Bon dimanche
Bisousce sont des situations et des cérémonies bien pénibles à supporter à tout âgeSouvenirs...émotions...
La vieillesse est si longue qu'il ne faut pas la commencer trop tôt (B. Groult)
on a une autre approche de la mort quand on est très jeune...
j'ai lu avec attention cet extrait de ton journal
bisou
béa kimcatje pense que je lis ce texte pour la première fois. Il est touchant, et tout ce que tu as ressenti à 10 ans tu etait déjà bien mûre. Moi j'ai beaucoup pleuré quand ma grand mère est parti, la mort m'a toujours fait pleurer, tu as raison on s'habitue à la mort on l'accepte quand on a un certain âge.
Et ton échang tu nous montres un peu ou pas, (oui suis curieuse)
Lorsque mon arrière grande mère est décédée je devais avoir une quinzaine d'années et elle a eu une vie longue, certes difficile par moment, mais bien remplie. Pour l'échange j'attends d'être sûre que ma binôme a bien reçu son colis.
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LIZAGRECE