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Crépin
Et si nous faisions connaissance d'un autre habitant de notre petit bourg ? Aujourd'hui je vous présente Monsieur Crépin. Monsieur Crépin est un très habile artisan, Le cuir n'a aucun secret pour lui. Il vous transforme la plus banale peausserie en une magnifique oeuvre d'art, qu'il s'agisse d'un sac à main, d'une paire de chaussure ou d'une ceinture.
Il était arrivé un jour, personne n'a jamais bien su d'où, avec son épouse la très discrète Madame Crépin et ils s'étaient installés dans la vieille cordonnerie que son ancien propriétaire venait d'abandonner pour cause de départ vers le paradis des chausseurs.
Ils avaient tout de suite plu au reste de la population ce charmant petit couple au sens littéral du terme. Ils étaient petits, fluets, avec une bonne figure avenante, discrets mais pourtant ouverts à la conversation, encore que personne n'était capable de se souvenir de quoi ils avaient bien pu parler ensemble. Chose amusante ils ne s'habillaient qu'en vert, mais de toutes les nuances de vert possibles et imaginables ce qui amusait beaucoup nos villageois qui ne détestent pas un peu d'originalité comme vous avez déjà pu le constater.
Au début bien sûr, sa façon de faire pour vous fabriquer une nouvelle paire de chaussures avait de quoi décontenancer les clients. Il les faisait se percher sur une sorte de petite estrade, pieds nus, puis il tournait doucement autour d'eux en murmurant entre ses dents des choses bizarres que personne ne comprenait. Ce simple "tour d'horizon" lui permettait de noter dans sa tête, sans utiliser mètre, papier et crayon, votre pointure, vos cors douloureux, la courbe de votre voûte plantaire, bref c'était comme si votre pied se dessinait en 3 dimensions dans sa tête.
Et avec ça rapide comme l'éclair notre petit cordonnier, votre paire de chaussures étaient prêtes dans la semaine et lorsque vous glissiez vos pieds dedans, vous aviez l'impression de chausser une bonne vieille paire de pantoufles bien confortables.
Bref, lorsque ses clients repartaient ils marchaient sur un petit nuage. Et petit à petit toute la population de notre petit bourg se mit à avoir une démarche de danseur toute en souplesse et en légèreté, même les plus anciens se sentaient pousser une nouvelle paire de pieds.
Lorsqu'un petit ressemelage était nécessaire, Madame Crépin vous proposait thé, café et petits gâteaux, tandis que son époux passait dans son atelier pour rendre une seconde vie à vos chaussures. Ce petit moment de détente était un moment délicieux qui vous faisait presque espérer que vos chaussures nécessiteraient bientôt une nouvelle petite révision.
Les sacs que Monsieur Crépin fabriquait et que Madame Crépin habile coutière et brodeuse décorait avec goût semblaient ne jamais rien peser sur votre épaule. Quant à ses ceintures, elles épousaient votre taille avec délicatesse et même après un repas copieux n'avaient jamais besoin d'être débouclées.
Bref, notre petit bourg avait hérité d'un sacré cordonnier.
Il avait juste un petit secret.
Lorsque le soir tombait et que sa journée de travail s'achevait, Monsieur Crépin rejetait en arrière ses cheveux abondants et ses oreilles apparaissaient, d'étranges oreilles longues et pointues. Dans le même temps son teint devenait comme diaphane. Puis, il montait l'escalier pour rejoindre son épouse et plus il montait, plus il devenait petit, léger, dansant, vif comme un lutin.
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Commentaires
1lizagreceMercredi 16 Septembre 2009 à 07:29Répondre
ce sont des personnages très savoureux! là, il faut vraiment que tu en fasses un recueil, c'est trop joli
quel talent j'attends avec impatience le mercredi pour te lire
et si tu en faisais un livre je serais la première à te l'acheter!
c'est trop bien bisous pluvieux de la grandmère des côtes d'armor
à plus
comme j'aimerais aller voir ce petit cordonnier pour qu'il me fabrique une paire de chaussure , souple , pour moi qui ai souvent mal aux pieds !! c'est un petit cordonnier lutin pas vrai ? c'est magique ! !
merci pour ce beau conte
bonne soirée
bisousBonsoir Martine ! Tu as écrit un superbe conte. Quel gentil petit couple ! Bisous !21BigornetteSamedi 18 Janvier 2014 à 17:4522PATSYSamedi 18 Janvier 2014 à 17:45J'aime de plus en plus ce petit village, hors du temps et des conventions. Une petite diablesse noire dans l'église, des lutins cordonniers, je sens poindre une grande saga elfiquo-campagnarde disjonctée qui ne déplairait pas à Terry Pratchett et Neil Gaiman. Elfie serait-il de la famille ???
Bonne journée
Bisous à toi et calins à Thalis.
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