• Ceci est une histoire improbable.

    En me rendant au travail j'ai croisé à plusieurs reprises la route d'un tigre blanc à l'air triste et d'un papillon cœur.

    De jour en jour, un murmure de plus en plus fort paraissait émaner d'eux.

    Alors, un soir, je me suis arrêtée, je les ai pris en photo, et j'ai entendu leur conversation.

    Le tigre était là depuis peu lorsque le papillon en forme de cœur vint le rejoindre.

    Profitant peut-être de ma présence, il osa prendre la parole dans un doux feulement pour ne pas effrayer la frêle créature au-dessus de lui.

    "Qui es-tu ? Que fais-tu ?

    "Je ne sais, je crois que je devais donner un rendez-vous comme toi".

    "Le mien est déjà passé, ceux qui m'ont déposé ici sont partis loin. Je n'ai plus de raison d'exister".

    "Moi aussi mon rendez-vous est passé. Et j'en ai assez d'être posé sur ce poing. Je n'aime pas les poings, je préfère les mains ouvertes".

    "Qu'importe, notre temps va bientôt s'achever. D'autres viendront nous recouvrir, j'ai vu cela se passer juste en face de nous avant ton arrivée. En attendant, je suis heureux de t'avoir comme compagnon, le temps me semblera moins long".

    "Tu as l'air triste, Tigre !"

    "Oui, j'en ai assez d'être prisonnier ici, j'aimerais connaître la liberté"

    "Moi c'est l'air sous mes ailes que j'espère. Hélas nous sommes coincés ici. Que fait cette femme avec son appareil ? Crois-tu qu'elle nous entend ?"

    Là, j'en profitai et j'intervins.

    "Vouloir, c'est pouvoir. Essayez, échappez-vous !"

    "Tu nous entends humaine ? Crois-tu vraiment que nous pourrions partir ?"

    "Bien sûr, essayez simplement de tout votre cœur !"

    Je repartis avec la photo que voici.

    Puis de jour en jour, en passant devant eux, je les ai vus s'éclaircir doucement. La couleur blanche devenant transparente, la couleur rouge s'estompant en rosé.

    De jour en jour, doucement ils sont partis vers un autre monde.

    Et un matin, en allant au travail, je vis qu'ils avaient disparu, laissant derrière eux dans une trace bleutée, un cirque vide et un poing inutile.

    Au loin, peut-être comme moi, verrez-vous passer la silhouette floue d'un tigre évanescent portant sur son épaule un papillon cœur d'un doux rosé, ou peut-être les devinerez-vous nuages flottants dans le bleu du ciel.

    En tout cas, ils se sont évadés de leur prison de papier et de notre monde gris, juste avant qu'un nouveau panneau publicitaire ne vienne les emprisonner et détruire leurs rêves car bien sûr vous le savez certaines affiches rêvent et espèrent.

     

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  • J'ai relevé plein de mots sympas pour l'Arche de Pol, mais plutôt que de les balancer bruts de décoffrage, j'en ai fait un tout petit texte.

    Grand-mère Célestine planquée sous sa quichenotte rapetassait une débarbouillette à la lueur du lumignon en attendant l'heure de préparer la soupe de potimarron.

    Une pensée la turlupinait depuis un moment. Où était encore passé grand-père Athanase ?

    Ce galapiat était-il encore parti en bamboche rien que pour l'emmouscailler ?

    Faire le mariole et prendre la poudre d'escampette, ça il savait faire l'animal !

    Un jour, elle le recevrait à coup de tromblon et jarnicoton on verrait bien si ce coup de Jarnac ne le ferait pas faire trois tours dans ses brodequins.

    Bref, laissant le fulmicoton à exploser les pépés de côté, mémé Célestine pense que dimanche, elle ira écouter l'orphéon et si pépé Athanase s'avise de ramener les quelques quenottes qui lui restent elle se chargera de lui envoyer un nasarde sur le pif et il n'aura plus qu'à aller nasiller avec ses copains au troquet du coin.

    Tiens, d'ailleurs, en parlant du leu, le voilà qui débaroule le goupillon à bouteilles dans une main, va savoir pourquoi, et lui adressant un grand sourire il lui offre la coloquinte qu'il vient d'acheter au marché.

    Mémé Célestine sourit, soupire et mentalement range son escopette. Il saura toujours la surprendre ce sacré vieux bougre.


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  • Papier libre nous a proposé comme consigne d'écrire un texte en se référant aux couleurs des voyelles d'Arthur Rimbaud. Voici, voilà donc mon interprétation à moi.

    A Aime la couleur Ananas
    E Epie la couleur Eucalyptus
    I Ignore la couleur Iris
    O Oublie la couleur Orange
    U Utilise la couleur Ultraviolette

    A Attend la couleur Abricot
    E Espère la couleur Eglantine
    I Irrite la couleur Ivoire
    O Offense la couleur Or
    U Use la couleur Uranium

    Et le Y ?
    Le Y se moque des couleurs.
    Il se parfume à l'Ylang Ylang
    Il se promène à dos de Yack
    Il joue avec son Yoyo

    Seulement, voilà, depuis les consonnes sont en ébullition, elles veulent elles aussi leurs verbes et leurs couleurs, résultat elles n'arrêtent pas de tourbillonner dans ma pauvre tête, alors il a bien fallu que je m'y mette histoire d'avoir la paix. Nous disons donc :

    B Bouscule la couleur Bleuet
    C Cueille la couleur Capucine
    D Dévore la couleur Dorée
    F Feuillette la couleur Flamme
    G Glâne la couleur Gorge de pigeon
    H Hèle la couleur Harissa
    J Juge la couleur Jonquille
    K Kidnappe la couleur Kaki
    L Lance la couleur Lumière
    M Marie la couleur Myosotis
    N Noue la couleur Nuage
    P Prépare la couleur Potiron
    Q Quémande la couleur Quatre-épices
    R Ramasse la couleur Rousse
    S Sirote la couleur Sinople
    T Transmet la couleur Terracota
    V Vole la couleur Violine
    W Warrante la couleur Wallaby
    X Xénophile la couleur Xéres
    Z Zappe la couleur Zinnia

    Voilà les filles, j'espère que ça vous convient, sinon tant pis pour vous. Bon d'accord pour certaines d'entre vous j'ai été un peu obligée d'inventer verbe ou couleur, mais que voulez-vous le dictionnaire a ses limites.


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  • Prêts à reprendre notre histoire d'horreur, alors voilà :

    L'ancien lève les yeux vers le ciel.
    Ceux qui l'entourent attendent, fébriles, son verdict.
    Il fait beau et chaud depuis quelques jours, les régulateurs vont bientôt revenir, préparez-vous
    Des exclamations fusent de toutes parts, les plus jeunes veulent en savoir plus. Les plus anciens déjà se résignent. Ils sont habitués à ce cycle immuable dans leur vie.
    Les plus jeunes se penchent vers l'ancien.
    Dis-nous ce qui va se passer !
    Eh bien, dès que la saison chaude arrive, les régulateurs reviennent eux aussi. Ils dévastent nos territoires et nous effacent.
    Comment nous allons disparaître, nous tous ? 
    Oui.
    Même les tendres enfants blancs ? Même ceux en rose ?
    Cela dépend, il paraît que certains régulateurs les évitent, mais c'est rare. Les autres sont sans merci.
    Et les têtes jaunes, ils y échappent ?
    Oh non, ceux-là encore moins que les autres, parfois même les régulateurs essaient de les éradiquer complètement.
    Mais c'est horrible ! Et ceux qui vivent au-delà des murs de pierre ?
    Ceux-là sont les privilégiés, l'épuration est toujours plus discrète mais notre sort est bien plus enviable que celui des rapides.
    Que leur arrive-t-il à eux ?
    Tout rapides qu'ils soient, parfois ils n'arrivent pas à échapper aux machines des régulateurs et ils sont broyés.
    Les régulateurs le font-ils exprès ?
    Même pas, pour eux, c'est tout juste s'ils existent, ils ne les remarquent qu'à peine.
    Mais pourquoi notre sort à nous est-il plus enviable que le leur ?
    Eux lorsqu'ils sont détruits c'est définitif, nous pas forcément.
    Est-ce douloureux ce qui va nous arriver l'ancien ?
    La première fois vous aurez peur, la douleur est rapide et ne dure guère, mais pour cela il faut que vous sachiez vous réfugier tout au fond de vous. C'est ainsi que je survis depuis si longtemps.
    Elle dure longtemps la saison des régulateurs ?
    Non, pas très longtemps, mais leur venue sera régulière pendant quelques mois. Ensuite nous pourrons reprendre des forces dans le calme de la saison froide. Un nouveau cycle de vie reprendra pour nous. Et pour vous soutenir, sachez qu'il paraît que les régulateurs eux aussi finissent par disparaître totalement, comme les rapides, ils ne savent pas se régénérer comme nous.

    Dans le calme de ce matin de printemps, tout à coup un bruit s'élève, un grondement sourd et menaçant, une trépidation fait trembler le sol.

    Ca y est, dit l'ancien, ils arrivent tenez vous prêts mes enfants. Courage petites marguerites bientôt vous renaîtrez, courage pissenlits, la régulatrice qui règne sur notre domaine n'essaye jamais de vous éradiquer totalement. Et vous primevères n'ayez crainte, si elle le peut elle vous évitera. Et vous les chanceux qui poussez le long des barrières ou sous les arbres vous aurez un peu de répit le temps qu'elle sorte de coupe-bordure.

    Bon, allez c'est pas tout ma fille, mais faut bien la faire cette première tonte, un peu de courage, mais vivement l'automne qu'il n'y ait plus besoin de sortir la tondeuse. Ah, flûte il faudra sortir le rateau à feuilles. Je vais finir par mettre de la pelouse synthétique moi et par faire abattre tous les arbres. Non je plaisante, l'odeur de l'herbe coupée est délicieuse et la couleur des arbres en automne est trop belle. Eh, toi l'araignée si tu ne veux pas qu'il t'arrive des bricoles, tu devrais filer en vitesse.

     

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  • Ca faisait longtemps que je ne vous avais pas mis un petit texte devinette. Alors voilà, le début de ma petite histoire.

    L'ancien lève les yeux vers le ciel.

    Ceux qui l'entourent attendent, fébriles, son verdict.
    Il fait beau et chaud depuis quelques jours, les régulateurs vont bientôt revenir, préparez-vous
    Des exclamations fusent de toutes parts, les plus jeunes veulent en savoir plus. Les plus anciens déjà se résignent. Ils sont habitués à ce cycle immuable dans leur vie.
    Les plus jeunes se penchent vers l'ancien.

    Dis-nous ce qui va se passer !
    Eh bien, dès que la saison chaude arrive, les régulateurs reviennent eux aussi. Ils dévastent nos territoires et nous effacent.
    Comment nous allons disparaître, nous tous ?
     
    Oui.
    Même les tendres enfants blancs ? Même ceux en rose ?
    Cela dépend, il paraît que certains régulateurs les évitent, mais c'est rare. Les autres sont sans merci.
    Et les têtes jaunes, ils y échappent ?
    Oh non, ceux-là encore moins que les autres, parfois même les régulateurs essaient de les éradiquer complètement.
    Mais c'est horrible ! Et ceux qui vivent au-delà des murs de pierre ?
    Ceux-là sont les privilégiés, l'épuration est toujours plus discrète mais notre sort est bien plus enviable que celui des rapides.
    Que leur arrive-t-il à eux ?

    Tout rapides qu'ils soient, parfois ils n'arrivent pas à échapper aux machines des régulateurs et ils sont broyés.
    Les régulateurs le font-ils exprès ?
    Même pas, pour eux, c'est tout juste s'ils existent, ils ne les remarquent qu'à peine.
    Mais pourquoi notre sort à nous est-il plus enviable que le leur ?
    Eux lorsqu'ils sont détruits c'est définitif, nous pas forcément.
    Est-ce douloureux ce qui va nous arriver l'ancien ?
    La première fois vous aurez peur, la douleur est rapide et ne dure guère, mais pour cela il faut que vous sachiez vous réfugier tout au fond de vous. C'est ainsi que je survis depuis si longtemps.
    Elle dure longtemps la saison des régulateurs ?


    Et là chères lectrices, chers lecteurs, il se passe quoi ? Je vous laisse en plan jusqu'à demain, mais vous devez avoir pigé de quoi je parle non ?


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